Ce récit fait partie d'un ensemble d'articles présentant le travail des volontaires du programme IPEV SUBANTECO conduit par l'université de Rennes 1.
Arrivée du navire aux Kerguelen
Après quelques jours d’attente, l’ACE arrive à Kerguelen ! Nous sommes donc le 5 janvier, il est 6h30 et on attend de connaître les programmes définitifs. Le vent retarde la réunion ainsi que le début des opérations scientifiques, et l’escale prévue à Kerguelen est finalement raccourcie à deux jours. Nous sommes tous impatients, mais dans ces régions ce sont les conditions climatiques qui commandent !
La rencontre : l’attente laisse place à l’émotion
Enfin, 10h30 : il est temps que j’enfile une combinaison étanche de survie pour pouvoir monter dans un hélicoptère jaune décoré du logo ACE. C’est parti. Le vent est fort, les turbulences secouent l’engin mais nous arrivons à destination : le brise-glace russe. Il est énorme, puissant. Nous descendons, lavons nos bottes avec un liquide biocide pour éviter de transporter graines, larves ou bactéries (biosécurité) et nous entrons dans le hangar du bateau. Les organisateurs de l’Institut Polaire Suisse et quelques scientifiques nous accueillent autour d’un café. Les yeux se croisent, les sourires s’échangent. On ressent l’impatience des scientifiques, pressés d’accomplir leurs recherches sur l’île. J’aperçois sur un t-shirt l’inscription « Science has no borders » (la science n'a pas de frontières), devise de la campagne.
Rassemblés autour d’une découverte
Après quelques premiers échanges, équipés des tenues de sécurité, Cédric, militaire affecté au service technique des TAAF et moi-même partons vers la plage de Molloy à l’ouest de la station Port-Aux-Français pour accompagner notamment Steven Chown, spécialiste des invertébrés de la région antarctique et subantarctique et Charlene Janion qui étudie les collemboles, petits invertébrés vivant dans les mousses et la terre.
Le but de cette excursion est d’échantillonner des collemboles et des Curculionidaes (groupe de coléoptères indigènes) dans différents microhabitats de la zone. C’est une belle occasion pour moi, accompagnateur naturaliste, d’escorter des chercheurs internationaux en excursion scientifique dans ces paysages sauvages. Durant près d’une heure de marche sur le Plateau de Tussock, sous une pluie qui se transforme en neige, on soulève des cailloux mais ce n’est pas le bon endroit. C’est plus loin, dans une zone plus sèche que l’on trouve plusieurs des espèces recherchées. L’enthousiasme est au rendez-vous et ne s’arrête pas là ! Tout en fouillant dans les fissures des roches sur la côte, nous croisons les doigts et… Palirhoeus eatoni, seule espèce des Curculionidaes à vivre dans cet habitat, est bien là !
Un véritable moment de partage
Alors que le temps s’améliore, je discute avec les chercheurs qui me confient concevoir l’ACE comme une belle opportunité d’étudier des terrains situés bien loin des sentiers battus. Nous partageons nos expériences, ils m’expliquent leurs sujets de recherche et leurs techniques de travail tout en me présentant le laboratoire mis en place sur le bateau.
Vers 16 heures, nous sommes de retour dans le zodiac : grosses vagues, vent fort, quelques difficultés au moment de réembarquer sur le navire russe. Steven m’offre des livres en souvenir, je rejoins l’hélicoptère et je dis au revoir à l’équipe, au navire Akademik Trechnikov et à la campagne internationale. Cette expérience fut courte mais enrichissante. Et n’oublions pas, « Science has no borders ! ».
Qu’est-ce que l’expédition ACE ?
Dans le cadre d’un projet scientifique international de circumnavigation (ACE), le brise-glace russe Akademik Trechnikov affrété par l’Institut Polaire Suisse, nouveau centre dédié à la recherche sur les environnements extrêmes, s’engage dans une mission de trois mois. Première expédition scientifique de ce genre, des escales dans les principales îles subantarctiques sont prévues pour permettre aux chercheurs de poursuivre leurs recherches dans toute la zone antarctique et subantarctique. Portant à bord 22 programmes de recherche, ce projet rassemble près d’une cinquantaine de chercheurs. En particulier, l’Université de Rennes 1 est impliquée dans le programme AFBA dont l’objectif est d’évaluer de manière globale la biodiversité de ces régions.