Erwan Faou analyse les lois de la physique grâce au numérique

Au carrefour des mathématiques et de l’informatique, Erwan Faou réalise des simulations numériques pour analyser des phénomènes physiques, avec des applications dans des domaines aussi divers que la météorologie, la physique quantique, l’évolution des planètes. Il a obtenu en 2011 une bourse européenne de l’ERC "consolidator" pour le projet Geopardi (Numerical integration of Geometric Partial Differential Equations).
Erwan Faou - Photo Inria/Anteale

Si pour beaucoup les mathématiques restent un mystère, pour Erwan Faou, directeur de recherche Inria, c’est du grand art au même titre que la musique ou la peinture. « La recherche en mathématiques est un métier extraordinaire, au cours duquel on peut produire de très belles choses », s’enthousiasme-t-il.

« Il faut beaucoup travailler, ça empêche de dormir parfois… mais c’est exaltant ! »

Normalien (ENS Cachan Bretagne), agrégé de mathématiques, il a intégré en 2001 l’équipe Ipso (Inria Rennes - Bretagne Atlantique) pour analyser, à l’aide de méthodes numériques, des équations de la physique, par exemple celles de la mécanique des fluides, de la mécanique quantique, ou encore de la physique des plasmas (à l’œuvre dans des projets comme la fusion nucléaire). « Les équations qui régissent ces phénomènes sont très compliquées du point de vue mathématique », explique le chercheur.

« Nous utilisons la simulation numérique pour analyser les phénomènes physiques sous-jacents et trouver des modèles numériques aussi proches que possible des modèles physiques ».

Avec son projet Geopardi (Numerical integration of Geometric Partial Differential Equations), Erwan Faou veut convaincre les mathématiciens les plus théoriques que ces modèles numériques peuvent être considérés comme des modèles à part entière et non comme de simples outils d'approximation, et qu’ils sont aussi importants que les équations traditionnelles de la physique.

Se confronter à des problèmes mathématiques plus difficiles

Grâce à la bourse du Conseil européen de la Recherche, Erwan Faou a constitué pour cinq ans une équipe de 2 doctorants et 3 post-doctorants (dont un pour deux ans). La bourse, d’un montant de 900 000€, a également permis l’organisation de rencontres interdisciplinaires, mêlant spécialistes de l’analyse numérique et mathématiciens plus théoriques.

« Je suis beaucoup allé à la rencontre d’autres chercheurs pour voir ce qu’ils faisaient ».

Le mathématicien a ainsi développé des collaborations à Lyon, Paris, en Chine, en Allemagne, ainsi qu’à Rennes.

Il souligne l’avantage d’un financement à cinq ans. « J’ai pu aborder des problèmes assez durs, me lancer dans des choses risquées, plus difficiles à confier à des doctorants. Si nous, les “seniors”, on ne se lance pas dans des problèmes à hauts risques, ce ne sont pas les jeunes qui peuvent se le permettre ». L’excellence des travaux d’Erwan Faou a été récompensée en 2013 par le prix Blaise Pascal de l’Académie des sciences et en 2015 par le prix SIAM (Society for Industrial and Applied Mathematics).

Trouver des solutions sans expériences coûteuses

Le temps de travail de l’ERC a permis de découvrir des solutions particulières à des équations de plasma très compliquées.

« La simulation numérique a mis en évidence de nouveaux phénomènes, qui poussent à écrire de nouveaux théorèmes tout en évitant de faire des expériences coûteuses ».

Erwan Faou et son équipe ont également trouvé des algorithmes en « temps long », qui décrivent des phénomènes pour lesquels on ne sait pas simuler une trajectoire (contrairement à ce qui se fait pour une trajectoire de balistique). Par exemple, dans le cas d’un système moléculaire, il n’est pas possible de simuler les trajectoires des particules, mais les algorithmes développés dans le cadre de Geopardi permettent d’estimer le comportement global de la molécule quels que soient les mouvements individuels des électrons à l’intérieur de celle-ci. Les problèmes mathématiques auxquels s’est confronté Erwan Faou dans ce projet sont si complexes qu’ils nécessiteront plus de cinq ans de travail. Ainsi, aujourd’hui Erwan Faou continue à approfondir son analyse de ces équations mathématiques.